L’on vient d’apprendre que le Mali du colonel Assimi Goïta ne tiendra pas l’élection présidentielle des 4 et 18 février 2024 pour des raisons techniques. Beaucoup réagissent vigoureusement contre cette décision. Il est vrai que cela peut s’apparenter à une confiscation du pouvoir. Mais à quoi ont servi les élections dans le chaos au Sahel ?
Depuis des décennies, le Mali a connu des élections et des dirigeants se sont succédé. Avec Amadou Toumani Touré (ATT), qui a fait un coup d’État et s’est retiré pour revenir plus tard à travers les urnes, l’on a cru que le Mali était définitivement sorti d’affaire. Mais les forces du mal ne sont jamais loin.
Et depuis plus de dix ans ce pays se bat contre un mal profond, le terrorisme. Oui, il y a eu coup d’État, la durée de la transition a été définie et il faut rendre le pouvoir. Mais, veut-on vraiment traiter le mal en profondeur ou juste passer rapidement à autre chose ?
L’ex président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) a été démocratiquement élu selon certains standards internationaux par une partie seulement des populations parce que les Maliens n’avaient pas le contrôle de tout le territoire. Son opposant Soumaïla Cissé a même de son vivant été pris en otage en pleine campagne électorale.
IBK a été emporté parce que l’on lui reprochait la mauvaise gouvernance et son incapacité à enrayer l’insécurité. Au Niger et au Burkina Faso, l’on a assisté à un schéma identique. Roch-Marc Christian Kaboré venait d’être réélu; et Mohammed Bazoum venait d’être plébiscité pour un premier mandat.
Non seulement l’on les accusait de ne pas résoudre le problème, mais aussi d’être complice de la situation avec certaines puissances étrangères. Au Tchad, le maréchal Idriss Déby Itno est mort au front. Et si son fils est venu au pouvoir en violation des textes de la République, c’est parce que l’on affirmait que la situation sécuritaire était hors de contrôle.
Alors, faut-il se presser d’organiser des élections pour ensuite assister à d’autres déstabilisations dans les toutes prochaines années ? Il faut assurément donner le temps aux militaires de stabiliser leurs pays. L’on a déjà fait l’expérience des transitions avec des élections saluées par tous au Niger, au Mali, au Burkina Faso etc…
Mais, voilà où l’on en est ! Les élections d’accord. Mais, il faut poser les fondations solides pour ces États qui vivent au rythme des déstabilisations.
Serge Lenoir