Changement climatique : L’Afrique se réchauffe plus rapidement que le reste du monde

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Du 4 au 6 septembre 2023 s’est tenu à Nairobi au Kenya, le premier Sommet africain sur le climat. Outre les chefs d’État et de gouvernement, l’on pouvait noter la présence de dirigeants mondiaux, d’organisations intergouvernementales, de communautés économiques régionales, d’agences des Nations unies, du secteur privé, d’organisations de la société civile, de peuples autochtones, de communautés locales, d’organisations agricoles, d’enfants, de jeunes, de femmes, d’universitaires. Une déclaration a sanctionné la fin des travaux.

Les dirigeants ont pris note du 6è rapport d’évaluation (AR6) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) déclarant que le monde n’est pas sur la bonne voie pour maintenir la limite de 1,5° C convenue dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015 sur le climat, et que les émissions mondiales doivent être réduites de 43% au cours de cette décennie.

Le Giec a également confirmé que l’Afrique se réchauffe plus rapidement que le reste du monde et que, s’il ne s’atténue pas, le changement climatique continuera d’avoir des impacts négatifs sur les économies et les sociétés africaines et d’entraver la croissance et le bien-être. Les dirigeants expriment leurs inquiétudes parce que de nombreux pays africains sont confrontés à des charges et à des risques disproportionnés résultant d’événements et de phénomènes météorologiques imprévisibles liés au changement climatique, notamment des sécheresses prolongées, des inondations dévastatrices, des incendies de forêt, qui provoquent une crise humanitaire massive avec des impacts néfastes sur les économies, la santé, l’éducation, la paix et la sécurité, entre autres risques.

Une action urgente et concertée de la part de toutes les nations est nécessaire pour réduire les émissions et réduire la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. L’Afrique n’est pas historiquement responsable du réchauffement climatique, cela n’est plus un secret pour personne. C’est la raison pour laquelle les dirigeants du continent réaffirment les principes énoncés dans la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et son Accord de Paris, à savoir l’équité, les responsabilités communes mais différenciées et les capacités respectives.

Des millions d’Africains n’ont pas toujours accès à l’électricité, et pour satisfaire ces besoins, l’on ne pourra que miser sur les énergies renouvelables. Tout le monde demande à l’Afrique de ne pas exploiter ses ressources fossiles qui sont disponibles en quantités importantes. Pendant ce temps, les plus gros pollueurs peinent à réduire leurs émissions. Et même si le continent doit essentiellement se tourner vers les énergies renouvelables, cela a un coût. Malheureusement, seuls 60 milliards de dollars, soit 2% des 3 000 milliards de dollars d’investissements dans les énergies renouvelables au cours de la dernière décennie, sont allés à l’Afrique. Alors, le continent doit-il continuer à sacrifier son développement sur l’autel de la lutte contre le réchauffement climatique ? La question mérite d’être posée quand on sait que les grandes puissances font aussi de ce problème, un moyen de domination des peuples les plus dépourvus de la planète pour mieux les exploiter.

La déclaration souligne que l’Afrique possède à la fois le potentiel et l’ambition d’être un élément essentiel de la solution mondiale au changement climatique. En tant que foyer de la main-d’œuvre la plus jeune et à la croissance la plus rapide au monde, associé à un énorme potentiel d’énergies renouvelables inexploité, à de nombreux atouts naturels et à un esprit d’entreprise, le continent possède les fondamentaux nécessaires pour ouvrir une voie compatible avec le climat et en devenant un pôle industriel prospère et compétitif en termes de coûts, doté de la capacité pour aider d’autres régions à atteindre leurs ambitions de zéro émission nette.

L’Afrique réaffirme sa volonté de créer un environnement favorable, d’adopter les politiques et de faciliter les investissements nécessaires pour débloquer les ressources nécessaires au respect de ses engagements climatiques et contribuer de manière significative à la décarbonation de l’économie mondiale. Il faudrait aussi reconnaitre le rôle important des forêts en Afrique, en particulier de la forêt tropicale du bassin du Congo, dans la régulation du changement climatique mondial. Sans oublier l’importance cruciale des océans dans l’action climatique et les engagements pris en faveur de la durabilité des océans dans plusieurs forums tels que la deuxième Conférence des Nations unies sur les océans en 2022 et la Déclaration de Moroni pour l’action sur les océans et le climat en Afrique en 2023.

Agir de toute urgence pour réduire les émissions, remplir les obligations, tenir les promesses faites et soutenir le continent

Les chefs d’État et de gouvernement des pays d’Afrique appellent à accélérer tous les efforts de réduction des émissions pour s’aligner sur les objectifs énoncés dans l’Accord de Paris ; honorer l’engagement de fournir 100 milliards de dollars de financement annuel pour le climat, comme promis il y a 14 ans lors de la conférence de Copenhague ; respecter les engagements en faveur d’un processus juste et accéléré de réduction progressive du charbon et d’abolition de toutes les subventions aux combustibles fossiles.

Ils appellent à des investissements positifs pour le climat et qui catalysent une trajectoire de croissance, ancrée dans les industries prêtes à transformer la planète et permettant aux pays africains d’atteindre un statut stable de pays à revenu intermédiaire d’ici 2050. « Nous appelons à la mise en œuvre du fonds pour les pertes et dommages, comme convenu lors de la CoP 27, et décidons d’adopter un objectif mondial mesurable en matière d’adaptation avec des indicateurs et des cibles permettant d’évaluer les progrès réalisés dans la lutte contre les impacts négatifs du changement climatique », précisent-ils dans leur déclaration.

Les États africains s’engagent à élaborer et à mettre en œuvre des politiques, des réglementations et des incitations visant à attirer les investissements locaux, régionaux et mondiaux dans la croissance verte et les économies inclusives ; propulser la croissance économique et la création d’emplois en Afrique d’une manière qui limite les émissions et contribue également aux efforts mondiaux de décarbonation, en dépassant le développement industriel traditionnel et en favorisant la production et les chaînes d’approvisionnement vertes à l’échelle mondiale.

Ils s’engagent aussi à concentrer leurs plans de développement économique sur une croissance positive pour le climat, y compris l’expansion des transitions énergétiques justes et de la production d’énergie renouvelable pour l’activité industrielle, des pratiques agricoles respectueuses du climat et réparatrices, ainsi que la protection et l’amélioration essentielles de la nature et de la biodiversité ; renforcer la collaboration continentale, qui est essentielle pour faire progresser la croissance verte, l’interconnectivité des réseaux régionaux et continentaux, et accélérer l’opérationnalisation de l’accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf).

Toujours en termes d’engagements, les pays africains veulent finaliser et mettre en œuvre la stratégie et le plan d’action de l’Union africaine pour la biodiversité, en vue de concrétiser la vision 2050 d’une vie en harmonie avec la nature ; fournir toutes les réformes et le soutien nécessaires pour porter la part du financement des énergies renouvelables à au moins 20% d’ici 2030 ; soutenir les petits exploitants agricoles, les peuples autochtones et les communautés locales dans la transition économique verte, compte tenu de leur rôle clé dans la gestion des écosystèmes.

Les dirigeants du continent s’engagent en outre à construire un partenariat efficace entre l’Afrique et d’autres régions, pour répondre aux besoins de soutien financier, technique et technologique et de partage des connaissances pour l’adaptation au changement climatique ; promouvoir les investissements dans les infrastructures urbaines, notamment en modernisant les établissements informels et les bidonvilles afin de construire des villes et des centres urbains résilients au changement climatique.

Enfin, ils promettent d’une part de renforcer les systèmes d’alerte précoce et les services d’information climatique, et de prendre des mesures précoces pour protéger les vies, les moyens de subsistance et les biens et éclairer la prise de décision à long terme liée aux risques climatiques ; et d’autre part d’améliorer les systèmes de résilience à la sécheresse pour passer de la gestion des crises à une préparation et une adaptation proactives à la sécheresse, afin de réduire considérablement la vulnérabilité des personnes, des activités économiques et des écosystèmes à la sécheresse.

Edem Dadzie

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