Le continent africain, surtout l’Afrique de l’Ouest enregistre ce que l’on peut qualifier d’épidémie de coups d’État. Au point où certains se demandent après chaque coup d’État : à qui le tour ? Est-ce des coups d’État bien programmés dans un but donné ? Certains parlent de révolution contre le néocolonialisme. Mais, et si cela était plutôt le début d’une nouvelle forme d’exploitation des peuples et de leurs territoires ?
Le Niger est pratiquement le dernier pays du Sahel qui fait face à une insécurité grandissante, à connaître un coup d’État depuis l’année 2021. Après la prise du pouvoir par les militaires au Mali, les relations se sont dégradés entre les autorités maliennes et les dirigeants français. Cela a abouti finalement au départ de la force française arrivée dans le pays depuis quelques années pour lutter contre le terrorisme. Au départ, la transition était dirigée par le colonel-major Bah N’daw. Mais, le colonel Assimi Goïta a réussi à le destituer, parce que l’on lui reproche une certaine proximité avec la France. Il était donc clair que le nouveau pouvoir au Mali ne voulait plus de la France à laquelle l’on reproche beaucoup de choses.
Il faut reconnaitre que le pays d’Emmanuel Macron a un lourd passif sur le continent africain, et il est connu aussi que la France a toujours cherché à contrôler ses anciennes colonies depuis les années d’indépendances, et que ces derniers n’ont vraiment pas pu profiter de cette indépendance. Beaucoup sont même convaincus que le continent n’est pas réellement indépendant. Cela explique ce fort désir des nouveaux pouvoirs militaires et des peuples qui les soutiennent de se tourner vers d’autres partenaires qui paraissent plus crédibles, dont la Russie. Ainsi, le Mali ne cache plus sa lune de miel avec la Russie de Vladimir Poutine.
Le colonel Assimi Goïta et le capitaine Ibrahim Traoré, le président de la transition du Burkina Faso étaient à Saint Petersbourg, du 27 au 28 juillet 2023 pour le deuxième sommet Russie-Afrique. Ils ont été invité par le Kremlin et accueilli avec tous les honneurs dus à leurs rangs; comme des chefs d’État, et c’est ce qu’ils sont d’ailleurs. Les occidentaux n’accepteront pas de le faire. Tout comme au Mali, le Burkina Faso a connu un coup d’État en 2022 avec la mise en place d’une transition dirigée par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. Ce dernier ne durera pas à son poste. Il sera renvoyé par le capitaine Ibrahim Traoré. Et l’on apprend qu’il aurait aussi une trop grande proximité avec la France.
Dans la foulée, les manifestations anti françaises ont augmenté dans le pays, avec la destruction des symboles du pouvoir français. Le nouveau pouvoir a aussi demandé le départ des troupes françaises qui étaient dans le pays depuis quelques années. Il n’y a plus de doute que le Burkina Faso s’est désormais tourné vers la Russie. L’on ne sera pas surpris si dans les semaines et mois à venir, le pays enregistre l’arrivée des forces du groupe paramilitaire Wagner, du Russe Yevgueni Prigojin. Prigojin a d’ailleurs apporté son soutien au coup d’État qui vient d’avoir lieu au Niger. Ces mercenaires sont déjà dans certains pays du continent comme la Centrafrique et le Mali.
Ces pays affirment être en partenariat avec la Russie, et que ce sont des instructeurs russes qui sont sur leurs territoires. Le pouvoir malien a récemment même demandé la fin de la mission des Nations unies, certainement pour mieux faire place à ces instructeurs russes. Le Niger a accueilli les forces françaises renvoyées du Mali et abrite aussi une base américaine. Le pays est sous assistance des Nations unies. Il faut préciser que beaucoup de Nigériens ne sont pas d’accord avec la politique française du président Mohammed Bazoum. Les panafricanistes les plus radicaux ont même prédit sa chute.
Lorsque la coup d’État a eu lieu contre lui le 27 juillet 2023, certains d’entre eux n’ont pas caché leurs joies. Ils ont même appelé les populations à soutenir les putschistes. S’achemine-t-on alors vers le basculement du Niger dans le bloc russe ? Mohammed Bazoum est-il victime de sa politique française ? Les Africains ont besoin de partenariats gagnant-gagnant que cela soit avec la Russie ou d’autres pays. Alors, si le fait de collaborer avec la Russie peut aider le continent à finir avec l’insécurité et à amorcer véritablement son développement pour rattraper les autres zones du monde, tant mieux.
Mais, il serait regrettable que des personnes qui se réclament du panafricanisme, trompent les peuples, les poussent à haïr certains partenaires au profit d’autres, à accueillir certaines puissances comme des sauveurs, et que finalement cela se révèle être une nouvelle forme d’exploitation. Les peuples ont tout intérêt à rester vigilants. Les dirigeants aussi devraient beaucoup faire attention parce que l’histoire pourrait les rattraper. En ce qui concerne les panafricanistes de toutes catégories, l’on espère que c’est vraiment l’intérêt supérieur du continent qui les anime…
Serge Lenoir