Le Forum sur le genre, pré-événement de la onzième session du Forum régional africain pour le développement durable (ARFSD-11) a eu lieu à Kampala, la capitale de l’Ouganda.
« Prenez quelques secondes pour imaginer une Afrique où chaque femme aurait le même accès aux opportunités, à la technologie et au leadership que son homologue masculin. Ce n’est pas un rêve, c’est un impératif économique », a indiqué Aboubakri Diaw, chef de cabinet et responsable de la division du genre, de la pauvreté et de la politique sociale à la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA).
« Au nom de la CEA, permettez-moi d’exprimer ma gratitude au gouvernement et au peuple ougandais pour leur invitation à co-organiser ce Forum sur le genre, en marge de la onzième session du Forum régional africain pour le développement durable », a-t-il ajouté.
« Cet événement, qui tombe à point nommé, souligne notre engagement commun à tirer parti de la science et de solutions fondées sur des données probantes pour bâtir un avenir inclusif, sensible au genre, durable et équitable pour tous », a-t-il poursuivi.
L’égalité des genres n’est pas seulement un objectif. Elle est le fondement de la transformation sociale et économique. Intégrer l’égalité des genres à l’innovation numérique, aux infrastructures de soins et aux systèmes de données n’est pas une option ; c’est essentiel.
En donnant aux femmes l’accès aux technologies, l’on promeut l’entrepreneuriat, la participation au marché et l’innovation. Investir dans les infrastructures de soins libère du temps et des talents. Et les données ventilées par sexe ? Elles révèlent l’invisible, permettant aux politiques de servir ceux qu’elles négligent souvent. Combinés, ces éléments deviennent un multiplicateur de force pour une croissance inclusive.
Pourtant, les chiffres ne mentent pas. L’Indice de genre en Afrique 2023 de la BAD et de la CEA n’atteint que 50,3 %, ce qui rappelle brutalement que l’on n’en est qu’à mi-chemin de l’égalité ; À mi-chemin des opportunités ; À mi-chemin de l’autonomisation. Si l’on ne relance pas les efforts, l’Afrique risque de retarder de 65 ans supplémentaires le rêve de l’ODD 5, repoussant l’objectif à 2094.
« C’est inacceptable. Nous devons changer de rythme. Nous devons accélérer le progrès, car le temps presse », affirme le responsable onusien.
À seulement cinq ans de 2030 (l’échéance des ODD), le continent doit marquer une pause, réfléchir et repenser ses stratégies. Il ne s’agit pas de petits progrès. Il s’agit de transformation. Il s’agit d’aligner les actions sur l’aspiration 6 de l’Agenda 2063, tout en créant des emplois décents et une prospérité inclusive.
L’on a réalisé des progrès indéniables. Le mariage des enfants est en baisse. De plus en plus de femmes accèdent à des postes de direction. De plus en plus de filles terminent leurs études secondaires. Mais il faut être honnêtes : le chemin est loin d’être terminé. Trop de femmes et de filles sont encore confrontées à des obstacles systématiques, en matière d’emploi, d’accès à la terre, de leadership et de capital.
« Le mois dernier, une jeune entrepreneure m’a confié : Je peux innover, mais je ne peux pas enregistrer de terres à mon nom. Son histoire n’est pas rare. Elle est courante », note-t-il.
Selon l’expert, les femmes gagnent moins, possèdent moins, dirigent moins. Et pourtant, elles portent plus, lus de soucis, plus de fardeaux, plus de résilience.
Elles gagnent 21% de moins que les hommes. Elles possèdent moins de 20% des terres agricoles. Elles ne bénéficient que des trois quarts environ des droits légaux accordés aux hommes. Ces inégalités ne freinent pas seulement les femmes. Elles freinent tout le monde.
Pour véritablement accélérer la création d’emplois tenant compte des questions de genre et la croissance économique inclusive, il faut libérer le plein potentiel des femmes et des filles d’Afrique.
À la CEA, l’on examine sept priorités stratégiques qui, sans doute, éclaireront la Déclaration de Kampala et unifieront la voix mondiale de l’Afrique cette année/
Premièrement, l’autonomisation juridique : Renforcer les cadres juridiques et politiques, les faire respecter. Garantir les droits fonciers des femmes et améliorer l’accès au crédit. Donner aux femmes les outils nécessaires pour investir dans leur vie, leur famille et leur entreprise.
Deuxièmement, les soins non rémunérés comme moteur économique : Les femmes assument près de quatre fois plus de tâches de soins non rémunérées que les hommes. Il est temps de transformer ce défi en opportunité. Avec des politiques adaptées, les infrastructures de garde d’enfants et de soins aux personnes âgées pourraient créer près de 300 millions d’emplois, dont jusqu’à 90% des bénéficiaires seraient des femmes.
Troisièmement, une protection sociale qui tienne compte des besoins de soins : Les gouvernements doivent prioriser les investissements dans une protection sociale tenant compte des sexospécificités. Les dépenses ne représentent en moyenne que 3,8% du PIB. C’est insuffisant. L’éducation de la petite enfance reste sous-financée. Il faut faire davantage.
Quatrièmement, réduire la fracture numérique entre les sexes : En Afrique, les femmes ont 19,2% moins de chances de posséder un téléphone portable et 27,6% moins de chances d’utiliser internet. Il ne s’agit pas seulement d’une fracture numérique, mais d’un écart de prospérité. La technologie doit devenir un outil d’inclusion, et non d’exclusion. Les partenariats public-privé sont essentiels.
Cinquièmement, les données comme catalyseur du changement : Les données ne se résument pas à des chiffres, elles sont aussi une question de visibilité. Si les femmes restent invisibles dans les statistiques, elles resteront exclues des politiques. Ce que l’on ne peut pas mesurer, l’on ne peut pas le transformer. Les données donnent le pouvoir non seulement de voir, mais aussi d’agir. L’on doit renforcer les systèmes statistiques nationaux et exploiter des sources non traditionnelles telles que le big data, l’IA et d’autres technologies de pointe.
Sixièmement, la représentation dans la prise de décision : Les femmes n’occupent que 26% des sièges parlementaires et 36% des postes de direction en Afrique. La représentation est importante. La voix est importante. L’inclusion est importante. L’on doit encadrer les filles, promouvoir la place des femmes et créer des cadres qui rendent le leadership équitable.
Septièmement, financer l’égalité des sexes : C’est un enjeu non négociable. L’Afrique se trouve à un tournant. L’aide diminue. Le surendettement s’accroît. La marge de manœuvre budgétaire se resserre. L’on doit accroître les ressources nationales par des réformes fiscales audacieuses, l’intégration du secteur informel, la lutte contre les flux financiers illicites, l’exploitation du potentiel vert de l’Afrique et la mise en œuvre d’une budgétisation sensible au genre.
« Quittons ce Forum non seulement avec des déclarations, mais aussi avec des échéances. Que chaque institution ici présente s’engage à mener trois actions mesurables et transformatrices avant notre prochaine réunion. La responsabilité doit commencer par nous », insiste Aboubakri Diaw.
Pour conclure, il invite chacun des participants à réfléchir à ces questions : quels obstacles pouvez-vous contribuer à briser ? Quel potentiel inexploité pouvez-vous libérer ? Quel héritage laisserez-vous aux femmes et aux filles africaines ?
La prochaine Conférence sur le financement du développement et le deuxième Sommet mondial pour le développement social seront des moments décisifs. Il faut être prêts, pas seulement en paroles, mais avec volonté ; pas seulement avec vision, mais avec engagement ; pas seulement avec des projets, mais avec détermination.
« Quittons ce Forum avec un sens renouvelé de notre mission : celle de défenseurs de la justice de genre, d’architectes du progrès et de champions du changement », a-t-il lancé.
« Ensemble, nous pouvons créer un avenir où l’égalité des sexes ne soit pas seulement une promesse, mais une expérience vécue, ancrée dans la dignité, l’empathie et l’humanité partagée. Un avenir où chaque fille se sent importante, chaque femme sait qu’elle a sa place et chaque garçon grandit en comprenant le pouvoir de l’égalité et du respect », a conclu Aboubakri Diaw.
LPM
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