Les 1er et 2 mars 2023 s’est tenu à Libreville au Gabon, le One forest summit, organisé par le gouvernement français en collaboration avec le gouvernement gabonais et d’autres partenaires. Lors de cette rencontre, Hindou Oumarou Ibrahim, coordonnatrice de l’Association des femmes peules et peuples autochtones du Tchad (AFPAT) a eu l’occasion de s’adresser aux dirigeants, notamment ceux d’Afrique. Ses propos sont très appréciés au sein de l’opinion publique internationale.
“C’est à vous et c’est à nous de protéger nos forêts. On ne va pas attendre que les autres viennent le faire à notre place”, a-t-elle lancé à l’endroit des dirigeants du continent. Pour aller plus loin, elle leur fait des propositions concrètes. “Il faut d’abord respecter le principal pilier qui est le droit foncier des communautés autochtones. Sans ces droits fonciers, nous ne pouvons pas conserver nos savoirs traditionnels et les transmettre de génération en génération. Nous avons accès à nos savoirs parce que nous avons le droit à nos terres et nous savons comment les exploiter. Les scientifiques sont clairs : les endroits les mieux protégés sont les endroits où les peuples autochtones vivent tranquille”, a déclaré Hindou Oumarou Ibrahim.
“Alors, nous voulons ce droit à la terre pour mieux faire notre travail. Vous avez signé à la CoP 15 pour la protection de 30% de la biodiversité. Je vous invite tous, dès que vous rentrerez chez vous, à considérer les peuples autochtones comme des acteurs, de construire avec eux, et non pour eux, des cadres de mise en œuvre clairs. Parce que c’est nous les experts. Nous ne restons pas dans les bureaux, nous sommes sur le terrain pour planter les arbres et les protéger”, a indiqué Hindou Oumarou Ibrahim. Bien sûr, elle s’adresse aussi aux pays du Nord dans son argumentaire.
“Vous avez pris des engagements que je ne peux même pas citer. Mais, on peut évoquer l’accord de Copenhague sur le financement, la Redd+, les derniers engagements à Glasgow (15 milliards de dollars pour les forêts, y compris 1,7 pour les peuples autochtones). Où est cet argent ? Nous ne pouvons pas continuer à vivre sur les engagements. Nous voulons que cet argent soit immédiatement disponible, et que nos peuples puissent avoir directement accès à ces financements en réalisant de vrais projets qui vont vous protéger. Ne venez pas me parler de mécanismes qui permettent d’instaurer la transparence etc…”, a-t-elle poursuivi.
“Si les autochtones protègent 80% de la biodiversité mondiale, qu’est ce qui nous empêche de gérer votre petit financement ? Peut-être que nos méthodes de gestion ne sont pas conformes à ce que vous enseignez dans vos écoles. Ma grand mère qui n’a pas été à l’école ne peut pas utiliser le logiciel Excel comme vous le faites, mais elle peut mieux protéger la forêt que vous. On vous a fait confiance pour détruire notre environnement. Maintenant c’est à vous de nous faire confiance pour la reconstruction”, a-t-elle martelé.
“Je salue les nouvelles initiatives de partenariat positif pour la nature. Ce partenariat positif pour la nature doit être pour les communautés et par les communautés pour un accès directe aux financements. Parce que nous les autochtones, nous sommes les Chiefs ecological officers (CEO). Nous sommes donc les meilleurs pour mettre en œuvre tout ce qui concerne notre environnement. J’aimerais que vous vous engagiez sur ce bateau avec nous”, a conclu la la coordonnatrice de l’AFPAT.
Edem Dadzie