Le réchauffement climatique devrait franchir la barre de 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle en Afrique d’ici 2050, soit un seuil supérieur à l’objectif le plus ambitieux de l’Accord de Paris sur le climat.
Ce constat est issu d’un rapport publié le 25 février 2025 par le Centre international pour l’agriculture et les sciences biologiques (CABI), une organisation intergouvernementale dédiée aux problèmes agricoles et environnementaux.
Intitulé « Developing just transition pathways for Africa’s agriculture towards low emission and climate resilient development under a 1.5°C global warming », le rapport rappelle que l’Accord de Paris, qui a été signé en 2015, préconise de contenir « l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C, en poursuivant l’action menée pour limiter la hausse de la température à 1,5°C d’ici à la fin du siècle en cours ».
Élaboré par une équipe de chercheurs kényans et zimbabwéens, le document note cependant que le continent africain se réchauffe plus rapidement que le reste du monde. La température moyenne annuelle a augmenté de plus de 0,5°C par décennie en Afrique au cours des trois dernières décennies.
En raison de l’augmentation continue des concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, les températures à court et à long terme devraient continuer à augmenter sur ce continent qui contribue à hauteur de moins de 4% aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, même si l’intensité du réchauffement variera selon les sous-régions.
L’Afrique du Nord, l’Afrique australe et l’Afrique de l’Ouest devraient enregistrer un réchauffement plus intense, les zones semi-arides et plus sèches de ces sous-régions devant connaître des taux d’augmentation de température plus élevés.
D’après les modélisations, les températures varieront entre 1,4 et 2,5°C en Afrique du Nord, entre 1,1 et 2°C en Afrique australe et entre 1,1 et 1,8°C en Afrique de l’Ouest d’ici le milieu du siècle en cours sous un faible forçage radiatif de 4,5 Wm-2 (En climatologie, le forçage radiatif est approximativement la différence de bilan radiatif, c’est-à-dire l’énergie reçue réduite de l’énergie perdue par un système climatique donné).
Des effets délétères sur la sécurité alimentaire
Globalement, dans un scénario d’émissions « business as usual », le réchauffement s’approchera de 4°C dans les cinq sous-régions d’Afrique d’ici la fin du 21ème siècle, selon les auteurs.
Par ailleurs, les précipitations diminueront de 4% en moyenne dans de nombreuses régions d’Afrique, d’ici le milieu du siècle, dans le cadre d’un scénario médian.
Le niveau moyen de la mer risque également de s’élever d’un demi-mètre, ce qui aura de graves conséquences pour le delta du Nil et les zones côtières de l’Afrique de l’Est, du Nord et de l’Ouest, alors que les phénomènes météorologiques extrêmes comme les sécheresses, les inondations et des cyclones tropicaux deviendront plus fréquents et plus intenses.
Le rapport souligne d’autre part qu’un réchauffement supérieur à 1,5°C d’ici 2050 aurait des conséquences très néfastes sur l’agriculture et la production de nourriture en Afrique. En Afrique de l’Ouest, le rendement du maïs devrait par exemple diminuer de 2 à 57% selon les scénarios de réchauffement, celui du sorgho de 8 à 48% et celui du millet perlé de 7 à 12%, d’ici le milieu du 21ème siècle.
En Afrique du Nord, la production de cucurbitacées devrait reculer de 10 à 15%, ce qui entraînera une réduction des disponibilités alimentaires et une augmentation des prix. D’où la nécessité de reprogrammer les systèmes de cultures, d’élevage et de pêche pour les rendre plus résistants au climat, en mettant l’accent sur une série d’éléments fondamentaux.
Il s’agit notamment de financer les progrès scientifiques et technologiques dans le domaine de l’agriculture résiliente au dérèglement climatique, de restaurer les pools génétiques des cultures et du bétail négligés ou sous-utilisés, de régénérer la fertilité des sols, de restaurer les terres dégradées, de protéger les écosystèmes naturels et la biodiversité, d’accroître les capacités de mobilisation des eaux pluviales, et de développer les marchés pour créer de nouvelles opportunités de distribution et d’échanges commerciaux.
LPM