Révisions constitutionnelles en Afrique : Construction ou déconstruction ?

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La semaine dernière, se sont tenues à Lomé, les 18èmes assises de l’Association africaine des hautes juridictions francophones (AA-HJF). Le thème de la rencontre était : « l’État de droit et la problématique des révisions constitutionnelles en Afrique ». Les travaux avaient été ouverts par le Premier ministre Victoire Tomégah-Dogbé et avaient permis d’avoir une vue d’ensemble sur les révisions constitutionnelles que le continent a enregistrées.

Ces dernières années, il y a eu plusieurs révisions constitutionnelles en Afrique. Certaines ont connu du succès. Mais, dans beaucoup de cas, cela a conduit à de graves conflits, notamment la déstabilisation des États, les coups d’État, les soulèvements populaires ayant entraîné la chute de régimes. Il est donc normal que la problématique des révisions constitutionnelles en Afrique interpelle les acteurs souvent impliqués.

« La thématique qui nous rassemble ce jour reflète parfaitement la nécessité de poursuivre l’ancrage des valeurs de l’État de droit, appréhendées au prisme de la démocratie constitutionnelle. Le choix du thème est d’autant plus pertinent que ce colloque intervient dans un contexte où notre sous-région est aux prises avec des manifestations d’instabilités politiques, liées parfois aux crises sécuritaires. Ces situations viennent avec cruauté nous rappeler l’importance pour un pays de bénéficier d’un climat de paix et de stabilité politique et institutionnelle », a affirmé le Premier ministre Victoire Tomégah-Dogbé.

La cheffe du gouvernement togolais a suggéré aux participants d’intégrer dans leurs analyses les réalités culturelles et les mœurs de nos pays, car selon elle, « il n’y a pas de modèle prêt à porter en démocratie ». « Nous devons travailler sur comment consolider les acquis mais aussi faire preuve d’adaptation quand cela est nécessaire car aucun système n’est immuable », a relevé Victoire Tomégah-Dogbé.

« La Constitution est l’âme de la République, le statut organique, l’acte statutaire de l’État, qui organise et sécurise l’État. Elle apparaît comme les moyens juridiques que se donnent les peuples pour organiser ensemble leur vie nationale, leur communauté de destin », a souligné Victor Dassi Adossou, président du Conseil d’administration de l’AA-HFJ, président de la Cour suprême du Bénin. Il déplore le fait que certaines révisions constitutionnelles dans les États africains soient devenues polémiques parce que jouant avec les fondamentaux de l’État de droit.

Selon le juge Abdoulaye Yaya, président de la Cour suprême du Togo, les révisions constitutionnelles « doivent se reposer et prendre en compte les fondamentaux de l’État de droit. Ce n’est que sous ce rapport qu’elles peuvent les renforcer et les consolider ». « Mais elles les affectent et les déconstruisent », regrette-t-il.

Au Togo, il y a eu une révision constitutionnelle réussie en 2019. Cette modification de la loi fondamentale était attendue depuis des années. Cela a fait l’objet de la signature de l’Accord politique global (APG) en 2006. Les manifestations du Collectif sauvons le Togo (CST) en 2012 et 2013 et celles de la Coalition des 14 (C14) en 2017 et 2018, étaient liées à cela.

La précédente législature de l’Assemblée nationale togolaise était divisée à cause de ces révisions constitutionnelles. Finalement, l’actuelle législature les a concrétisées. Une partie de l’opposition trouve qu’il s’agit de réformes à minima, taillées sur mesure. Mais, beaucoup d’acteurs majeurs et objectifs ont salué cette avancée qui tient compte de l’histoire politique du pays.

Comme l’a dit le juge Abdoulaye Yaya en citant Marc Michael Jean, ancien secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) : « Les mutations constitutionnelles doivent s’inscrire dans l’unité et la diversité des aspirations partagées dans le respect des principes universels de la démocratie et des modalités de partage des pouvoirs … ».

Edem Dadzie

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